UN PROPHETE-Entre les murs-

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Tahar Rahim. Roger Arpajou
 
Condamné à six ans de prison, Malik El Djebena ne sait ni lire, ni écrire. A son arrivée en Centrale, seul au monde, il paraît plus jeune, plus fragile que les autres détenus. Il a 19 ans.
D'emblée, il tombe sous la coupe d'un groupe de prisonniers corses qui fait régner sa loi dans la prison. Le jeune homme apprend vite. Au fil des " missions ", il s'endurcit et gagne la confiance des Corses.
Mais, très vite, Malik utilise toute son intelligence pour développer discrètement son propre réseau...
La rentrée du cinéma français est lancée!
Après l'excellent drame intimiste "Partir" de Catherine Corsini, voici le tant attendu nouvel opus de Jacques Audiard, auréolé de son récent (et mérité)  Grand Prix à Cannes.
A priori le sujet n'est pas forcément attirant, de plus 2h30 en compagnie d'un prisonnier, l'univers de la prison avec ses habitudes, ses caïds, ses bandes organisées...! et pourtant! quelle leçon de cinéma nous est offerte ici, une maestria technique  et narrative qui nous scotche souvent sur notre fauteuil, le tout est à la fois sobre, nerveux, d'un réalisme brut qui glace et choque même parfois.
L'itinéraire de cet enfant -pas- gâté à son arrivée en prison, obligé de tuer pour survivre (scène très angoissante du meurtre dans la cellule!), de devenir l'esclave d'un chef de  "mafia" corse, et qui, à force d'intelligence, va prendre les rênes et s'affranchir jusqu' à faire chuter les soi-disant plus forts que lui, ou "Regarde les hommes tomber" par "Un héros très discret" pour reprendre deux titres du même auteur!
Aucun des personnages décrits ici n'est sympathique, soit de simples voyous, soit d'odieux profiteurs et magouilleurs, et pourtant on "s'attache" à eux, grâce surtout à une direction d'acteurs magistrale.
En premier lieu le débutant (28 ans quand même!) et inconnu au cinéma Tahar Rahim, jeune acteur absolument irradiant, charismatique, électrique, il compose un personnage complexe, au départ simple mouton, innocent (avec son regard d'enfant, Audiard d'ailleurs l'a choisi aussi pour çà, "il a rien de tragique en lui"), jeté dans une meute de charognards, il va devenir lui-même un loup prêt à tuer pour sauver sa peau, mais aussi pour prendre lui-même le pouvoir, se libérer, à force de volonté et d'observation,  évoluant à la fois physiquement et moralement, à la fois ange et démon, doux et violent, il est d'une justesse confondante, vraiment exceptionnel, un futur grand, gageons que le César lui tende les bras!Et même si Christoph Waltz dans le dernier Tarantino est très bien, le Jury aurait pu lui préférer Tahar Rahim, dans un rôle beaucoup plus étendu!
A ses côtés, en parrain corse,le toujours impressionnant  Niels Arestrup est grandiose de malice et de colère, à la fois persécuteur blasé et "monstre" protecteur, avec son physique superbe, son regard de tueur mais aussi rempli de lassitude et de mélancolie désespérée qui apporte beaucoup au personnage. Leurs face-à-face sont d'une force époustouflante, comme la scène où il éructe de rage envers son jeune "protégé" ("si tu manges, si tu respires, c'est à cause de moi...").Deux grands comédiens, l'expérience du vieux routard et la fraîcheur du débutant surdoué !Le talent à l'état pur!
Tous les seconds rôles sont criants de réalisme et de force tragique, à l'image de son "frère de prison", Ryad, malade et trafiquant de drogue, interprété par un excellent Adel Bencherif.
Ce qui fait la force de ce film de genre(s), à la fois film noir, thriller, mais aussi histoire de trahisons, de manipulations,de transmission, à travers ces différentes communautés qui cohabitent, c'est aussi son mélange de scènes très réalistes, limite documentaire, notamment par sa manière de peindre l'univers carcéral si particulier, et à la fois son côté romancé, parfois poétique, comme avec le rêve prémonitoire des biches sur la route, parfois à la limite du surnaturel, comme avec toutes ces scènes où Malik parle au fantôme de sa victime sacrifiée,  finalement son seul "compagnon pour la vie",  lui qui le hantera définitivement, comme un boulet qu'il va traîner dan sa tête.
Cette incursion onirique apporte au récit toute la force romanesque et cinématographique nécessaires pour nous captiver et nous faire rentrer en immersion dans ce milieu souvent étouffant, dont on ressort un peu ébranlé.
Un récit initiatique percutant, dur, violent, au réalisme saisissant,  et surtout du cinéma puissant, efficace et superbement maitrisé.

NIELS ARESTRUP-JACQUES AUDIARD-TAHAR RAHIM-
CANNES 2009-Photos persos-

MA NOTE: 16/20





Publié dans Vu en salle-THRILLER-

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F
...mais quel ennui et quel manque d'émotion...
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P
TAHAR !Ils sont bien beaux tous les trois !<br /> Je retourne voir ce Prophète demain je pense.<br /> Je suis devenue dingue de Tahar !
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F
un blog très sympa et culturel , félicitation , venez visiter mon blog @++++++++
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